L'agriculture et l'élevage à Chaumontel

Dans le dernier numéro du Petit Chaumontellois, nous évoquions le caractère rural du village en développant l’histoire de la ferme Dequidt. Il apparaît aujourd’hui que l’accent pourrait être mis sur les activités économiques du village tout au long de son histoire. Nous nous sommes fondés sur quatre documents inédits, dont deux sont conservés aux Archives départementales du Val-d’Oise, à Cergy. Les deux autres documents sont des archives privées familiales.

Agriculture, élevage à Chaumontel
Dans son Histoire du diocèse de Paris, l’abbé Lebeuf écrit que le territoire de Chaumontel était en vignes, labourages et prairies.Plan de Chaumontel (terres, prés et bois) – Musée Condé Chantilly-cliché jmrb_2007

Les terres fertiles du fond de la vallée de l’Ysieux sont propices à l’agriculture et à l’élevage. Les collines et les terres exposées au sud favorisent la vigne.

Défrichage des surfaces non encore cultivées et dessouchages des parties de la grande forêt voisine, permettent d’agrandir les surfaces exploitables.
La vigne semble avoir tenu une place prépondérante à Chaumontel.

Le voisinage de la forêt princière, à partir du 18è siècle, porte un coup dur à la vigne comme à l’agriculture. En effet, la rive droite de l’Ysieux qui englobe la plus grande partie des terres labourables de Chaumontel, se retrouve comprise dans la Capitainerie royale de Halatte. Le secteur des Commissions est dans ce périmètre.

Le gibier y abonde : cerfs, biches, sangliers, lièvres et lapins, causent des dégâts aux récoltes. Les habitants de Chaumontel reconnaissent qu’il est nécessaire de nommer un messier chargé de garder les grains, jour et nuit, jusqu’à la fin des récoltes, dans un secteur s’étendant de la rivière d’Ysieux jusqu’aux bois de Chaumontel, de Coye, de Bertinval, à la Genetraye et à la pièce Côme. Propriétaires et laboureurs rémunérent le messier. La durée de la surveillance est de 121 jours. Outre les grains, la surveillance est étendue à la vigne et aux foins.

A la mort de Louis-Henri, duc de Bourbon, prince de Condé, en 1740, le comte Charles, son frère, ayant eu la tutelle de son neveu, Louis-Joseph, fils du Louis-Henri, étend son domaine de chasse jusqu’à Chaumontel, entraînant une chute des activités agricoles et la reconquête de la forêt sur des espaces autrefois libérés. La Genetraye retrouve ses bois qui laissent leur nom à la ruelle des Bois.

Néanmoins, il convient de faire gardienner les grains qui continuaient d’être récoltés. A ce titre, au 18è siècle, Chaumontel compte trois messiers qui surveillent les récoltes jour et nuit. A Chaumontel s’est développé un art particulier : le jardinage.
Les actes notariés font référence à des clos et à des jardins. C’est ainsi le Pralet, Vitel et Outreville peuvent s’enorgueillir de posséder ces espaces propices au jardinage grâce à la vallée fertile et bordée de forêts.
Ce sol est particulièrement favorable à la production de la poire. Le poirier demande un sol profond, fertile et froid, ce que peuent lui procurer les alluvions de la rivière d’Ysieux.
Les Rayons ou Grouets étaient plantés en vigne et en cerisiers.  Le Besi de Chaumontel

Au milieu du 17è siècle, au Pralet, le jardinier Martin Regnault (époux de Anne Barré), obtient la fameuse poire, dénommée Besi ou Beurré de Chaumontel, dite la reine des fruits. L’histoire de cette poire commence en fait avec la présence régulière d’Agathe Pain au château du Pralet, durant la belle saison.

Agathe Pain rapporte du nord une poire. Les pépins semés avec d’autres dans la cave du château, cellier recouvert de terre dans la grande cour, donnent naissance, vers 1670, à un sauvageon épineux.
Le pomologue Merlet l’inscrit dans son édition de 1675 en baptisant le sujet Poire de Chaumontel qui prend sa place parmi les Bezi, c’est-à-dire poires de première qualité.

Agathe Pain est citée dans un acte de 1692 comme représentante de demoiselle Louise Le Bossu de Marsay, marraine du fils du jardinier.
A sa mort, Agathe Pain laisse une somme d’argent pour carreler l’église. Le carrelage est réalisé en juin 1708.

Delaunay, bibliothécaire du Jardin des Plantes, nomme le Bezi de Chaumontel, le premier parmi les Beurrés, en le décrivant ainsi : Bezi de Chaumontel, Beurré d’hiver, varié de forme et de couleur, demi-beurré, fondant, excellent (Le Bon Jardinier, 1806).

Les Chartreux de Paris donnent une place au Bezi de Chaumontel dans leur catalogue.
En 1765, Duhamel représente le fruit tel qu’il lui avait été offert par M. d’Arsilly, possesseur du premier Bezi de Chaumontel.
Près d’un siècle plus tard, le poirier produit encore de nombreuses poires.
L’Almanach de Versailles de 1791 mentionne le poirier d’où ont été tirés tous ceux qui produisent le fruit connu sous le nom de Chaumontel.
Martin Regnault devient concierge du château. Il y demeure. Il meurt en 1686, âgé de 60 ans.

Le Bezi donnerait ses plus beaux fruits à Jersey. Les horticulteurs de cette île se procurent à Angers de jeunes sujets dont les fruits seront revendus en Angleterre. En hiver, le Bezi se vend au prix de un franc durant l’Empire (environ 2,20 € 2006). Le Bézi qui poussait au Pralet et sur le secteur des Montagnes disparaît totalement sous la Révolution, durant l’hiver de 1789.
Une autre espèce, le Chaumontel anglais ou Poire Douville. Cette poire se confond avec celle d’Oignon, de la famille de la Fontaine, seigneurs de Bertinval et d’Oignon.

Pâturages de ChaumontelLa récolte des navets (ferme Réthoré)
Un berger communal garde le troupeau de bêtes appartenant à différents propriétaires. Il le mène aux pâtures (Voir Petit Chaumontellois N°26 – AutrefoisChaumontel 11), où les animaux restent libres mais parqués; le souillard y a sa cabane.
En 1659, un berger communal ;
En 1652, un vacher ; Joannes Metas ;
En 1665 : un vacher ; Etienne Aubé ;
L’élevage des troupeaux tient une grande place à Chaumontel.

L’un des propriétaires n’est autre que le curé de Chaumontel, le curé Joseph Desmazures, qui possède un cheptel de 25 brebis. Il signe un bail pour une durée de trois ans confiant ses brebis au laboureur Pierre Pelletier et à sa femme Jeanne Fouquet.Pré au lieu-dit les Déruchies (cliché jmrb_2006)

La Voie aux Vaches et la Voierie aux Porcs, entre Chaumontel et Luzarches, illustrent la présence de cheptels sur le territoire de Chaumontel. Notons également le patronyme de Goret à Chaumontel qui rappelle le métier de souillard surveillant les porcs dans les pâturages forestiers qui bordent Chaumontel.
En 1892, A. Charlot, instituteur, écrit dans sa monographie sur Chaumontel « qu’une grande partie du sol agricole est exploitée par des cultivateurs de Luzarches et de Seugy ; cinq seulement habitent la commune.

Le territoire est partagé entre un grand nombre de propriétaires ; 2 possèdent chacun 30 h de terres et bois ; 4 en ont de 10 à 20 h ; 1 de 5 à 10 h ; 15 de 1 à 5 h et 98 moins de 1 h.
Les principales plantes cultivées sont le blé, l’avoine, la betterave, la pomme de terre, les pois, les haricots et les navets. Ces trois derniers produits sont expédiés ou portés directement à Paris.
On élève peu de bétail ; il n’y a qu’une quinzaine de vaches. La plaine est assez giboyeuse ; la perdrix et l’alouette dominent.

Jean-Michel Rat & Renée Baure-Rat (†}

jmrbrulis@orange.fr

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